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HISTOIRE DE L'INSTITUT PIKLER ET SES CARACTERISTIQUES

En 1946, aprËs avoir exercÈ ses activitÈs de pÈdiatre auprËs des familles pendant une dizaines d'annÈes, le Docteur Emmi PIKLER se voit donnÈ la t’che de crÈer une nouvelle pouponniËre dans la ville de BUDAPEST.

A cette Èpoque, Emmi PIKLER connaÓt les tout nouveaux travaux sur "l'hospitalisme" notamment ceux de R.SPITZ, et la polÈmique qui existe autour de la difficile prise en charge des jeunes enfants privÈs de leur milieu familial.

En jetant les bases de la nouvelle institution , elle fait une option claire, fondamentale : si un jeune enfant ne peut pas Ítre ÈlevÈ par sa mËre, la relation maternelle ne peut pas Ítre reproduite; cependant il doit Ítre possible d'offrir ý l'enfant, dans le cadre d'une collectivitÈ, une expÈrience de nature tout ý fait diffÈrente qui, cependant, favorise son plein Èpanouissement. Se basant sur ses observations lors de son travail auprËs des familles et sur l'approche psychopÈdagogique du bÈbÈ qu'elle y a dÈveloppÈe elle prend option pour ceux des facteurs d'un dÈveloppement sain qu'elle pense primordiaux et rÈalisables en milieu institutionnel.

C'est pourquoi elle rompt de faÁon radicale avec les pratiques courantes des pouponniËres de l'Èpoque. Elle va dÈvelopper et perfectionner progressivement une pratique, dont les principes et les objectifs sont clairs et bien dÈfinis, mais dont la rÈalisation est souple et adaptÈe aux besoins mouvants des enfants. Cette pratique constitue un ensemble de soins cohÈrents, constant dans ses grandes lignes mais bien individualisÈe et suivi dans son dÈroulement au sujet de chacun des enfants.

Convaincue de l'importance des effets de l'environnement sur la santÈ physique et psychique des enfants, elle obtient l'autorisation d'utiliser dans un quartier agrÈable, "La Colline des Roses", dans la rue Loczy, une vaste villa dotÈe d'un grand jardin o˜ les enfants pourront jouir d'une vie au calme et au grand air. Bien que vaste, la villa et petite pour l'accueil des jeunes enfants qui lui sont confiÈs (70 dans les annÈes 1960), et il lui faut dÈployer une grande ingÈniositÈ pour que chaque enfant dispose d'un espace de vie suffisant, ý l'intÈrieur comme ý l'extÈrieur.


Principes directeurs

I -   Partant de l'importance de l'attachement du bÈbÈ ý sa mËre, elle considËre comme de premiËre importance de crÈer les conditions pour que chaque enfant ait un lien stable et intime avec les adultes qui s'occupent de lui, et encore plus particuliËrement avec un adulte. Pour ce faire :
       - de leur arrivÈe ý leur dÈpart, les enfants vivent dans le mÍme
           groupe et sont confiÈs ý un nombre restreint d'adultes stables ;
       - convaincue que l'essentiel de la relation adulte-enfant se noue
           notamment au cours des soins corporels et que, en institution
           tout particuliËrement, les soins offrent des temps privilÈgiÈs
           pour "Ítre ensemble et se dÈcouvrir", elle dÈveloppe une
           approche minutieuse des soins ;
       - transmise ý chaque adulte, cette attitude de base attentive ainsi
           qu'un dÈroulement rÈgulier de la journÈe et du soin sont de tout
           temps offerts ý l'enfant qui y trouve continuitÈ et sÈcuritÈ ;
       - chaque nurse est plus particuliËrement responsable du
           dÈveloppement et du bien-Ítre de deux enfants, avec lesquels
           elle dÈveloppe une relation plus proche ;
       - dËs le plus jeune ’ge, l'adulte dit ý l'enfant non pas seulement
           ce que lui, l'adulte, lui fait et ce que l'enfant fait, mais lui
           tÈmoigne Ègalement son intÈrÍt ý travers des dialogues riches
           de sens; c'est ainsi que le soin est Ègalement un des moments-
           clÈs du dÈveloppement de l'intelligence et de la parole de
           l'enfant ainsi que de sa socialisation.


II -   Les dÈcouvertes et les travaux d' Emmi Pikler sur le dÈveloppement de la motricitÈ avant la marche sans intervention directe de l'adulte, ainsi que ceux qui en sont issus, sur l'activitÈ autonome de l'enfant dÈs le plus jeune ’ge, l'ont persuadÈe du rÙle primordial que ceux-ci jouent, ý cÙtÈ des soins, dans le dÈveloppement aussi bien affectif qu'intellectuel de l'enfant. C'est pourquoi :
       - la vie des enfants est organisÈe de telle sorte que dans leur temps
           d'Èveil ils puissent bouger, jouer en toute libertÈ et sÈcuritÈ,
           dans une aire de jeux spacieuse, non seulement dans la piËce
           du groupe mais aussi sur la terrasse et dans le jardin ;
       - la motricitÈ libre et l'activitÈ des enfants sont "nourries" de faÁon
           indirecte par la nurse qui dispose, ý l'intention de l'enfant, le
           matÈriel correspondant ý ses intÈrÍts et capacitÈs du moment ;
       - pendant les temps de soins cette libertÈ motrice est tout aussi
           respectÈe, elle est un des moyens pour l'enfant de s'exprimer;
           dans des conditions matÈrielles adaptÈes dans ce but, l'adulte
           peut encourager l'enfant ý s'intÈresser au soin et y participer
           activement.


III -   Pour lutter contre les risques de dÈpersonnalisation que porte en elle la vie en institution, c'est consciemment que sont mises en place des actions de nature ý favoriser chez l'enfant la prise de conscience de soi, de son environnement et de sa propre vie :
       - la rÈgularitÈ des ÈvÈnements, pour chacun des enfants en
           particulier,
dans le temps et la stabilitÈ dans l'espace ;
       - tout est fait pour aider l'enfant ý comprendre d'abord, ý bien
           savoir par la suite, qui il est, ce qui lui arrive, ce qu'on lui fait et
           ce qu'il fait, qui s'occupe de lui, quel est sont environnement...;
           tout ceci se situant dans l'immÈdiat et, pour l'enfant plus grand,
           dans un avenir ý court terme ;
       - de nombreuses notes sont prises pour permettre ý l'enfant
           de construire et de prÈserver ý l'avenir son histoire personnelle
           au sein de l'Institut ;
       - une prÈparation et un accompagnement de l'enfant et de ses
           parents lors de leurs rencontres, une prÈparation minutieuse ý la
           sÈparation et ý l'engagement dans de nouvelles relations sont
           mises en place lorsque l'enfant doit quitter l'Institut.


IV - Bien-Ítre et bonne santÈ physique sont recherchÈs ý travers tous les dÈtails de la vie quotidienne ( rÈgime alimentaire, vie au grand air favorisÈe au maximum, ...).


RÈsultats

Parmi d'autres enquÍtes et recherches, nous mentionnons une enquÍte Catamnestique qui s'est dÈroulÈe entre 1968 et 1970, financÈe par l'Organisation Mondiale de la SantÈ. Dans le cadre de cette Ètude, 100 personnes, ’gÈes alors de 14 ý 23 ans qui avaient ÈtÈ ÈlevÈes comme jeune enfant ý l'Institut puis au sein de leur famille, ont ÈtÈ rencontrÈes. Bien que la plupart aient grandi dans des familles incomplËtes, avec un seul parent remariÈe ou non, aucun n'a montrÈ de symptÙmes flagrants de dÈsordre de la personnalitÈ caractÈristiques d'une petite enfance passÈe en institution. Ces rÈsultats, ainsi que d'autres, sont probants et montrent la soliditÈ des effets ý long terme des soins offerts par l'Institut sur le dÈveloppement de la personnalitÈ.


Rayonnement de l'Institut

En 1970, l'Institut devient "Institut National MÈthodologique de soins et d'Èducation pour les petits enfants". DÈs lors il a pour t’che le contrÙle et le soutien professionnel du travail des pouponniËres du pays. Ce travail de soutien est poursuivi par l'Institut Pikler encore maintenant.

Des annÈes plus tard, dans la plupart des pouponniËres hongroises, les enfants peuvent vivre une vraie vie d'enfant. Dans les meilleurs d'entre elles on peut affirmer que les enfants sont actifs, intÈressÈs et capables de nouer de vÈritables liens, comme les autres enfants de leur ’ge.

Ces rÈsultats qui viennent s'ajouter aux rÈsultats de l'enquÍte citÈe plus haut, confirment la valeur prÈventive et thÈrapeutique de la "conception piklÈrienne" du dÈveloppement et du soin au jeune enfant.

En 1986, ý l'occasion de son quarantiËme anniversaire, l'Institut devient Institut PIKLER .

Au cours des derniËres annÈes, de plus en plus de professionnels Ètrangers s'intÈressent au travail de l'Institut, venant en visites, demandant des confÈrences et stages, traduisants les publications.... Ces professionnels travaillent non seulement au sein de pouponniËres mais aussi dans d'autres collectivitÈs d'enfants : crËches, halte-garderies ... Plus encore, c'est l'ensemble des mÈtiers de la petite enfance et aussi le milieu universitaire qui s'intÈressent aux travaux de l'Institut.

En effet ces travaux sont prÈcieux dans la progression de la comprÈhension des processus du dÈveloppement du jeune enfant. Leur prise en compte au niveau des soins et de l'activitÈ, qu'il s'agisse d'enfants sains ou handicapÈs, d'enfants heureux ou en difficultÈs au sein de leur famille ou sÈparÈs de celle-ci s'avËrent Ègalement d'une grande efficacitÈ .

Les cinq congrËs internationaux qui ont eu lieu les quinze derniËres annÈes ainsi que les centaines de publications en huit langues tÈmoignent de l'extension de l'intÈrÍt manifestÈ pour les idÈes de Pikler dans le monde.


Evolution actuelle

Pendant que l'Èquipe investit beaucoup d'Ènergie dans son travail national pour amÈliorer la qualitÈ des soins dans les pouponniËres et les crËches hongroises et y rencontre un succËs reconnu, pendant qu'elle fait des efforts pour satisfaire les demandes venues de l'Ètranger, elle doit affronter des nouveaux enjeux ý l'intÈrieur de l'Institut vue la population nouvelle qui y arrive.

Parmi d'autres ceux-ci ont conduit l'Èquipe ý deux recherches essentielles :
       - d'une part ý analyser les effets de "l'approche piklÈrienne"
           sur des enfants ayant vÈcu des expÈriences antÈrieures
           douloureuses pendant de longs mois et/ou prÈsentant un dÈveloppement
           plus lent liÈ ý leur prÈmaturitÈ, ý une fragilitÈ premiËre
           ou ý un handicap ;
       - d'autre part ý rÈflÈchir ý l'application des principes directeurs
           de l'Institut pour des enfants plus ’gÈs afin de rÈpondre ý leur
           besoins nouveaux.

Le dÈveloppement satisfaisant des enfants et l'effort que fait chacun d'eux, en utilisant leurs forces intÈrieurs pour comprendre et affronter leur situation particuliËre et Èlaborer leur histoire personnelle, sans oublier la sensibilitÈ exceptionnelle des enfants envers les difficultÈs de leurs camarades, renforcent les convictions de l'Èquipe dans la valeur de la philosophie Èducative de l'Institut.

C'est la continuitÈ dans l'orientation de l'Institut depuis 52 ans qui permet aux membres de l'Èquipe de chercher des rÈponses aux questions qui se posent en suivant la logique de leur conception Èducative, et ceci en dÈpit des dÈfis et des nouvelles t’ches ý rÈsoudre.

Emmi Pikler a dirigÈ l'Institut jusqu'au 1979. Judit Falk, aprËs avoir travaillÈ auprËs d'elle comme directrice adjointe pendant 17 ans, lui a succÈdÈ jusqu'au 1991. Elle a conduit l'Institut avec les mÍmes perspectives rigoureuses tout en apportant des innovations nÈcessaires en rÈponse aux nouveaux problËmes posÈs notamment par la diversitÈ des enfants accueillis. La directrice qui a repris sa t’che, Gabriella P¸sp–ky a commencÈ ý travailler ý l'Institut comme jeune pÈdiatre en 1966. Actuellement, c'est Anna Tardos qui dirige l'Institut.

Depuis la constitution de la Fondation Internationale Emmi Pikler les projets d'avenir de l'Institut ont pris un nouvel Èlan. Ceci concerne ý la fois l'organisation interne de l'Institut, l'extension de la formation ý l'Institut mÍme, l'Èlargissement de l'activitÈ d'Èdition, l'approfondissement des contacts internationaux, ...